02 Déc 2011 IBM / MAIF : le contrat était valable

(Cet article a été publié il y a 13 ans.)

Dans un arrêt du 25 novembre, la Cour d’appel de Poitiers est revenue sur le jugement rendu par le Niort » href= »http://www.bernardlamon.fr/wp-content/uploads/2011/12/jugement-tgi-niort-ibm-maif.pdf »>TGI de Niort le 14 décembre 2009. Alors que la MAIF avait gagné en première instance, la Cour d’appel a opéré un revirement complet.

En l’espèce, la MAIF a acquis en 2002 le droit d’exploiter un progiciel destiné à la modernisation et à l’optimisation de la relation avec ses sociétaires. En 2004, IBM s’est vu confier l’intégration du progiciel. Il s’agissait d’un contrat « clés en main » dans lequel IBM s’engageait à opérer dans des délais impératifs et à des coûts définis. Le contrat était assorti d’une clause limitative de responsabilité.

Au fur et à mesure des travaux, IBM et la MAIF ont conclu plusieurs avenants au contrat décalant le calendrier et réévaluant le coût du projet. En novembre 2005, les parties ont constaté l’impossibilité de terminer le projet dans les conditions initiales. En juin 2006, la MAIF a mis fin au projet d’intégration, puis la MAIF a assigné IBM devant le TGI de Niort pour vice de consentement et manquement à son obligation de résultat. Parallèlement, une expertise judiciaire a été ordonnée.

En première instance, le TGI de Niort a prononcé l’annulation du contrat et des avenants, pour dol, en retenant qu’IBM avait surpris le consentement de la MAIF en lui faisant croire que le projet était « tenable » dans les conditions initiales alors qu’IBM savait parfaitement depuis le début que l’accomplissement du projet était impossible. Le tribunal avait condamné IBM à verser à la MAIF la somme de 11 millions d’euros. Le jugement était assorti de l’exécution provisoire.

Le 25 novembre 2011, la 1ère chambre civile de la cour d’appel de Poitiers a infirmé le jugement du TGI de Niort.

La cour retient d’abord que le projet a été ajusté par des avenants successifs acceptés par la MAIF en toute connaissance de cause. La cour rejette donc le dol. La cour d’appel relève également que, si le livrable n’a pas été rendu dans les délais, la MAIF  a accepté ce retard en actant la modification du planning  initial.

Ensuite, la cour d’appel de Poitiers, constatant la parfaite connaissance technique de la MAIF, écarte le manquement à l’obligation de conseil. La cour a donc reconnu la validité du contrat. En conséquence, la cour d’appel de Poitiers a condamné la MAIF à verser la somme de 5 millions d’euros à IBM.

Deux enseignements peuvent en être tirés. Premièrement, la cour d’appel retient une obligation de conseil à géométrie variable, en fonction de la connaissance technique du client. Comme la MAIF avait un service informatique important, elle ne peut pas bénéficier sur l’obligation de conseil de la même protection d’un profane. Sans être professionnel de l’informatique au sens strict (la MAIF vend des mutuelles, pas des ordinateurs), elle est reconnue compétente.

Deuxièmement, pour rejeter le dol, la cour retient que la MAIF a accepté plusieurs avenants acceptant le décalage du projet initial. L’erreur fatale (selon la cour) de la MAIF a été d’accepter les avenants au contrat initial. Paradoxalement, le client qui fait preuve de réalisme et même de bienveillance à l’égard de son prestataire se retrouve pénalisé à cause de sa bienveillance…

Dans une relation contractuelle que l’on sait évolutive, le risque d’insatisfaction est toujours plus élevé. Une attention particulière devra donc être portée aussi bien aux termes du contrat initial qu’aux avenants accompagnant la progression de la relation.

Il ne faut pas penser qu’il s’agit là de questions purement techniques ou de gestion de projet. Le juriste doit être consulté…

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Bernard Lamon
Bernard Lamon
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