26 Mar 2011 Peut-on twitter un jour de vote ?
A la veille du deuxième tour des élections cantonales, la question se pose : peut-on twitter un jour de vote ?
J’ai été interrogé par France Inter à ce sujet, et je peux donner quelques éléments de réponse dans ce billet…
Deux articles semblent répondre à la question : les articles L 49 et L 52-2 du code électoral.
Le premier texte impose 24 heures de paix sur internet et interdit le tractage le jour du vote. Le deuxième interdit la publication par tout moyen (y compris par internet, défini comme : « tout moyen de communication au public par voie électronique ») des résultats avant la fermeture du dernier bureau de vote.
Illustration récente : une ordonnance rendue par le juge des référés de Nanterre à propos d’une élection à Puteaux. Un candidat twitte quelques messages le jour du premier tour. Son adversaire l’assigne pour qu’il soit condamné à ne rien twitter le jour du second tour.
Le juge retient qu’aucun des twitts du premier tour ne peut être qualifié de « propagande ». « Au demeurant », le candidat assigné a pris l’engagement de ne pas twitter le jour du second tour.
Il semble que l’on puisse interpréter cette ordonnance comme signifiant que les candidats ont le droit de principe de twitter tant qu’ils ne font pas de « propagande ».
L’engagement du candidat n’est que la cerise sur le gâteau si les mots ont un sens : « au demeurant » signifie « de manière superflue ». J’en tire pour conclusion que, même si ce candidat n’avait pas pris cet engagement, la décision aurait été la même.
En tout cas, cette décision ne résout rien. Les candidats peuvent évidemment, par précaution, ne rien faire le jour du scrutin.
Mais l’article L 49 est d’application générale : si un supporteur d’un candidat twitte un message de propagande, le résultat pourrait être annulé !
On imagine le risque de manipulation : un candidat mal placé demandant à un supporteur de faire de la propagande par un twit pour tenter d’obtenir l’annulation du scrutin.
Mais en matière électorale, la jurisprudence est très spéciale. En effet, le scrutin peut être annulé, mais seulement dans des cas relativement rares. La décision d’annulation est le produit de trois critères :
Gravité de la violation * écart entre les candidats * capacité de l’adversaire à répondre.
En substance, le scrutin est annulé seulement en cas d’atteinte à la sincérité du scrutin. Dès lors, il faut que :
– La violation de la loi soit grave (un tract distribué à trois exemplaires à 8 jours du scrutin n’est pas pris en compte),
– L’écart entre les candidats soit faible (aucune chance d’obtenir, même en cas de violation grave, la nullité s’il y a 20 points d’écart entre les candidats),
– Et enfin, que l’adversaire n’ait pas pu répondre (une affiche injurieuse placardée à la veille du scrutin sera plus considérée qu’une affiche placardée trois semaines avant).
Voilà quelques éléments à la limite des sujets habituellement traités dans ce blog, mais qui illustrent la capacité du droit à prendre en compte les nouveaux outils de communication.